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Communication de M. Goodfield (G.B.) à l'International Symposium on Atopic Dermatis, 09/2001, Portland (Etats Unis).  
  Le pimécrolimus (Elidel, Novartis) est un inhibiteur sélectif des cytokines pro-inflammatoires, ciblé sur les cellules cutanées libérant ces médiateurs pro-inflammatoires de l'eczéma atopique. Ce nouveau traitement topique non stéroidien a fait les preuves de son efficacité dans le traitement à long terme de l'eczéma atopique, en particulier chez le nourisson et le jeune enfant. Il réduit significativement l'incidence des poussées d'eczéma. En cas de poussée, il diminue le prurit et le recours aux corticoïdes topiques, que l'on utilise qu'avec prudence chez le jeune enfant.  
     

Dr Jean-Michel AUGE, Dermatologue, SAINT-GERVAIS (74)
  A- Le traitement des poussées
   

1°) Les dermocorticoïdes : ce sont des crèmes à base de cortisone, mal aimées, qui sont pourtant, lorsqu'elle sont correctement utilisées, à la fois très efficaces sur les poussées d'eczéma et sans risques particulier. L'inefficacité qu'on leur reproche souvent ("ça revient dès que j'arrête") vient en général d'une mauvaise utilisation. Les effets indésirables sont insignifiants dans des conditions normales d'emploi. Ils sont surtout observés en cas d'utilisation incorrecte ou dans d'autres maladies de peau nécessitant des traitements beaucoup plus longs que dans l'eczéma. Bien au contraire, la sous-utilisation habituelle des dermotortioïdes est aggravante pour l'eczéma, puisqu'en le rendant supportable elle lui permet de s'étendre à bas bruit et que la présence de lésions chroniques favorise les nouvelles sensibilisations.

PRINCIPES DE BASE POUR UNE CORTICOPTHERAPIE LOCALE EFFICACE ET SÛRE

Traiter la totalité des lésions, le plus tôt possible
  Il n'y a pas de petites poussée: une seule plaque d'eczéma suffit à perturber la vie par la démangeaison qu'elle entraîne, à entretenir la maladie eczéma dans son ensemble en favorisant la pénétration des allergènes de surface et donc le développement de nouvelles allergies. Tout eczéma évolutif a aussi tendance à réactiver les anciennes plaque d'eczéma (eh oui, même guéries, elles restent en mémoire dans la peau quelque temps). C'est pourquoi il faut traiter l'endemble des lésions, et poursuivre le traitement des endroits guéris en premier jusqu'à la guerison de la dernière plaque.
Choisir un produit de puissance adaptée à l'endroit que l'on traite
  Des dermocorticoïdes d'activité "assez-forte" sur le visage (Locapred, Tridesonit...), "forte" sur le corps ou le cuir chevelu (Diprosone, Betneval...), "très forte" sur les mains ou les pieds (Diprolène ou Dermoval). Une puissance trop faible par rapport à l'endroit soigné ne ferait qu'atténuer mais pas guèrir l'eczéma. Une puissance trop forte réduirait la marge de sécurité pour les effets indésirables.
Choisir une présentation adaptée à la localisation et à l'aspect de l'eczéma
  Une lotion pour les régions pileuses, une pommade pour un eczéma très sec ou fissuré, une crème dans tous les autres cas. Les pommandes sont contre-indiquées en cas de suintement.
En mettre suffisamment, 2 fois par jour jusqu'à ce que la peau redevienne normale
  Une noisette de crème devrait couvrir la surface d'une main, par exemple. Le corps entier d'un enfant peut nécessiter un tube de 30g par jour. Une seule application quotidienne atténuerait mais ne guérirait pas l'eczéma. Arrêter le traitement avant la disparition complète de l'eczéma exposerait à une récidive.
Respecter une durée maximum de 3 semaines
  Toute durée supérieure expose à des effets indésirables, mais surtout l'absence de guérison de l'eczéma dans ce délai est suspecte et il faut en rechercher la cause (quantité insuffisante, puissance trop faible ou rythme d'application trop rare du corticoïde, infection ou suintement l'empêchant d'agir, allergie au produit, allergène présent en permanence, épuissement des effets...)
Arrêter brutalement, la peau doit rester normale au moins une semaine
  Une récidive rapide sur les sites traités signe la résurgence de la même poussée, et donc un traitement insuffisant. Rien à voir avec "l'effet rebond" qu'on peut voir après une corticothérapie générale prolongée.
En remettre dès le début de toute nouvelle poussée
  Avec un traitement précose, la démangeaison est soulagée aussitôt, la poussée guérit en quelques jours avant de pouvoir réveiller les anciennes plaques, et le traitement ne concerne que de petites surfaces.

2°) Les autres traitements des poussées : ils sont soit insuffisamment efficaces (crèmes anti-inflammatoire, sulfate sz cuivre), procurant alors au mieux une simple atténuation des plaques mais sans guérison, soit plus risqués comme les ultraviolets, la cortisone par voie générale, la ciclosporine, qui peuvent entraîner des effets indésirables graves et ne sont utilisables que dans des eczémas très sévères. Une nouvelle molécule, la tacrolimus, remplacera peut-être les dermocorticoides dans quelques années.

 
  B- Les traitements de fond
   

Mal évalués scientifiquement, ils peuvent être envisagés, en complément du traitement des poussées, lorsque celles-ci sont très rapprochées ou n'arrivent pas à guérir malgré un traitement correct.

1°) L'éviction des allergènes : elle est très utilisée car séduisante psychologiquement : on pense souvent tenir le ou les coupables de tous ses maux et pouvoir plutôt que de guérir. Mais elle est souvent décevante dans ses effets pour plusieurs raisons :
  - les allergies ne sont jamais les mêmes d'une personne à l'autre (aucune éviction standard n'est possible) et se renouvellent incessamment (il faudrait adapter l'éviction quasiment mois par mois).
  - les tests allergologiques ne concernent qu'une minorité des allergènes présents dans l'environnement (il faudrait avoir beaucoup de chance pour que la totalité des allergènes responsables de la poussée en cours soit présent dans cette minorité) et exporent davantage l'allergie de type immédiat (dosage des IgE spécifiques dans le sang et non dans la peau, pick-tests qui déclanchent de l'urticaire et non de l'eczéma) que de type retardé comme dans l'eczéma. Seuls les tests épicutanés identifient des allergènes potentiels, sans jamais prouver leur responsabilité dans les lésions du moment
  - l'éviction des allergènes identifiés est rarement parfaite, d'une part en raison des contraintes énormes qu'elle impose quotidiennement, aboutissant souvent à une véritable psychose, d'autre part en raison des multiples allergies croisées.
 
   

La démarche la plus raisonnable semble être celle que tout le monde pratique déjà : supprimer ce qui à l'évidence est responsable de poussées d'urticaire ou d'eczéma. Il faut vivre le plus normalement possible par ailleurs. On ne peut pas vivre sans allergène autour de soi.

2°) La désensibilisation : les remarques précédentes en expliquent l'inefficacité habituelle : les allergies sont trop nombreuses et fluctuantes dans l'atopie pour pouvoir espérer une désensibilisation artificielle efficace. Miser davantage sur la désensibilisation spontanée.

3°) Les antihistaminiques : ils ne sont pas les anti-démangeaisons universels et anodins que l'on croit : leur efficacité relative dans l'eczéma n'est due qu'à leur pouvoir somnifère (cela a été démontré récemment), ce qui se comprend bien puisque l'eczéma n'a que peu de rapports avec l'histamine. De plus, ils peuvent être responsables d'effets indésirables graves comme en témoigne le retrait récent du marché du Teldane et de l'Hismanal pourtabt largement utilisés. Leur seule indication dans l'eczéma est le traitement ou la prévention des manifestations urticariennes parfois associées.

4°) Les cosmétiques : leur emploi parait de bon sens, mais il faut faire attention à ne pas se laisser influencer par le phénomène de monde et la pression énorme exercée par les laboratoires qui les fabriques. Les savons synthétiques semblent être ceux qui agressent le moins la peau lors de la toilette. Les crèmes hydratantes peuvent soulager la sensation de tiraillement cutané mais, non conçues pour être appliquées sur des plaies, elles sont souvent mal tolérées et génèrent de plus en plus d'allergies. Elles sont donc contre-indiquées sur l'eczéma évolutif où la peau est très perméable. Enfin, tous ces produits sont chers, souvent assimilés à tort au traitement des poussées, et n'ont en tout cas pas démontré scientifiquement leur interêt dans l'eczéma.

5°) Les autres traitements de fond : l'homéopathie, l'acupuncture, les guérisseurs et autres magnétiseurs obtiennent parfois de bons résultats, peut-être oar l'influence qu'ils ont sur le système immunitaire, lui même sous dépendance du psychisme. Il est raisonnable de "tenter le coup", à condition de ne pas supprimer pour autant le traitement des poussées. Le résultat serait catastrophique. Il vaut mieux ne pas trop rêver devant la phytothérapie ou les suppléments alimentaires du genre "acides gras essentiels" : les principes actifs des plantes médicinales ou suppléments alimentaires vendus en France (tisanes, gélules) sont bien connu et sans interêt démontré dans l'eczéma. Les plantes étrangères peuvent être bien moins contrôlées, comme en témoignent les quelques cas d'hépatite toxique observés avec les herbes chinoises.

 

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